Stations-service : La mort lente

Stations-service : La mort lente

Stations-service : La mort lente

Avec en moyenne 2,9 stations-service pour 100 km2 contre 3,4 en Europe, la France a l’un des réseaux de distribution d’essence les moins denses de l’Union européenne. Une situation qui ne cesse de s’aggraver. Cet été, sur les nationales et départementales, vous subissez les affres du témoin de carburant allumé depuis trop longtemps, n’accusez pas trop vite votre imprévoyance. Ces trente dernières années, le nombre de stations-service traditionnelles est en effet passé de 45430 en 1970 à 11688 en 2001. Un mouvement qui s’accélère : depuis 1985, 23200 stations ont disparu alors que durant la même période environ 2000 stations d’hypermarchés et supermarchés apparaissaient, portant leurs effectifs à 4410 unités. Même si cette tendance est générale en Europe, la France a subi une érosion impressionnante de son réseau de stations-service qui la place désormais en avant-dernière place, juste devant l’Espagne.

Un seul caissier
Il est vrai que l’augmentation conséquente du prix du carburant ces dernières années, additionnée à la disparition des “pompistes”, a conduit l’automobiliste à rechercher plus souvent un prix qu’un service, ce qui ne peut que bénéficier aux stations de grandes surfaces, qui considèrent le carburant comme un produit d’appel vendu… à prix d’appel. De plus, le carburant étant l’un des rares produits dont le prix fait l’objet d’un affichage visible depuis la route, la guerre des prix est exacerbée. Pour cela, la grande distribution ne répercute que très faiblement les coûts d’exploitation propres à ces stations. De plus, elle applique une marge extrêmement faible, voir nulle, sur le carburant. De même, les coûts d’exploitation d’une station de supermarché sont inférieurs à ceux d’une station traditionnelle pour plusieurs raisons. D’abord, elle n’emploie le plus souvent qu’un seul caissier, les horaires et jours d’ouverture sont limités et les services proposés réduits au minimum. Ensuite, leur implantation à l’extérieur des agglomérations permet de construire sur des terrains moins onéreux que pour une station en centre-ville. Enfin, leur débit de carburant supérieur à la moyenne (481 m3 par mois, contre 219 m3 par mois pour une station traditionnelle) permet de réduire les coûts du m3 distribué.

Pépins moteurs
Moralité, les stations-service traditionnelles souffrent de la même concurrence que celle subie par les petits épiciers de quartier face aux grandes surfaces. Et la communication sur la qualité de leurs carburants n’a guère profité aux pétroliers, puisque ceux-ci livrent également 80 % du carburant vendu par les grandes surfaces. “Avec un carburant sans additif, répondant aux normes officielles mais sans plus”, rétorquent en cœur Total, BP, Esso, Shell…. Seule certitude, la quasi-totalité des casses ou pépins moteurs signalés par nos lecteurs incriminent les stations de grandes surfaces, accusées de ne pas laisser leurs cuves décanter après remplissage et de négliger leur nettoyage périodique. Il n’empêche, sur un marché de 43,3 millions de m3 de carburant automobile, la part des stations de la grande distribution est passée de 55,5 % en 2000 à 57,2 % en 2001 quand celle des pétroliers chutait à 42,8 %. Et ces derniers annoncent de nouvelles réductions drastiques de leur réseau, comme Shell qui a décidé de vendre 600 de ses 950 stations françaises dans les deux années à venir.

La disparition de ces stations “de proximité” conduit des -municipalités à subventionner “leur” station afin qu’elle puisse -continuer à servir leurs administrés, obligés sinon de parcourir parfois 30 à 40 km pour se ravitailler.